Chapitre VII.5

Air Afrique et Air France – Aux grands maux les grands remèdes

Air France, de plus en plus réservée, prenait souvent, sans aucun préavis donné aux fournisseurs et sans en informer préalablement Air Afrique, des décisions unilatérales en vue de sauvegarder ses intérêts, par exemple en retirant directement son aval auprès de ceux-ci (Aéroport de Marseille, Servair à Roissy puis plus tard Airbus Industrie).

Sir Harry, anglophone de formation et de culture, était très critique, parfois non sans raisons, vis-à-vis d’Air France qui le lui rendait bien. De plus, il avait aux yeux de certains, la fâcheuse tendance à vouloir s’intéresser, pour Air Afrique, plus aux avions Américains qu’aux avions Européens.

Tout ceci explique sans doute, pourquoi, malgré le paiement hebdomadaire de 300 millions de francs CFA depuis plusieurs mois, les créanciers et assureurs crédits aient effectivement mis leur menace à exécution le 7 juillet 1998, obligeant Sir Harry à leur restituer les 4 avions A310-300, (soit près de 50% de la flotte), juste au démarrage de la période de pointe. Cette période est connue pour être celle où les Compagnies font le maximum de recettes, donc celle où, à priori, le débiteur Air Afrique, pouvait être en mesure de rembourser une partie de ses dettes.

Par le passé, ces mêmes créanciers et assureurs crédit avaient habitué Air Afrique à des menaces similaires, sans jamais aller jusqu’à poser des actes ayant des conséquences irréversibles, faisant toujours preuve au dernier moment, selon la terminologie convenue, de « flexibilité et de compréhension ».

Toutefois, et ceci explique peut-être cela, un Directeur délégué de l’équipe Billecart avait coutume de rappeler ce proverbe Corse : « Lorsque la barbe gène, il faut trancher la tête ».

Malgré le retrait de ces 4 avions, mais grâce à des locations d’avions de remplacement, la Compagnie a survécu et réussi, non sans mal, à passer la période de pointe 1998. Cet épisode a abouti, contre toute attente, à créer un sursaut « multi-nationaliste », autant au niveau du personnel, tous corps de métiers confondus, que dans l’opinion publique, et conduit au développement d’une profonde et réelle sympathie de la clientèle et de certains organismes nationaux pour Air Afrique.

Cet élan de solidarité qui avait, déjà, comme initiateur Monsieur Charles Konan Banny, alors Gouverneur de la BCEAO et panafricaniste convaincu, s’est prolongé et structuré pour donner naissance à « l’association des usagers d’Air Afrique », association qui continue d’exister encore aujourd’hui sous cette appellation, malgré la disparition de la Compagnie.

Avec le recul, tout indique que pour avoir réussi à traverser la période de pointe amputée de 50% de sa flotte, situation à laquelle aucune Compagnie ne pouvait logiquement survivre, Air Afrique pouvait encore être sauvée si les « Politiques », au-delà de leurs déclarations d’intentions, en avaient eu la ferme volonté, et si, mais on ne le dit pas assez, le personnel avait, fait preuve de plus de conscience professionnelle, plutôt que d’agonir « la Direction Générale » de toutes sortes de qualificatifs dénigrants, sans se remettre en cause un tant soit peu.


Chapitre VII.4 – La Gestion de Sir Harry

→ Chapitre VIII – Le self-service des agents, pour que vive la Compagnie

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