Chapitre VI.4

1996 : le Tsunami souhaité par tous était là !

La rencontre de Bangui (15 février 1996) avait donné un coup d’accélérateur au chronogramme de la mise à mort programmée de Monsieur Yves Roland-Billecart et de son équipe.

Rappelons la situation du moment :

– Le PDG et son équipe étaient contestés autant à l’intérieur qu’à l’extérieur de la Compagnie, pendant que la mobilisation syndicale pour obtenir leur éviction était à son paroxysme.

– Les résultats de la Compagnie s’effondraient inexorablement, et la cohésion de l’équipe de commandement autour du PDG s’effritait de manière irréversible. Le PDG se défiait ouvertement de Michel Olivier Mignard son « spécialiste Afrique », maintenait de plus en plus de distances et manifestait beaucoup de réserves dans ses relations avec Christian Folly-Kossi son conseiller spécial. Pendant ce temps le contrôleur de gestion, Monsieur François Marchal, qui ambitionnait d’être nommé Directeur financier et qui en avait eu promesse du PDG, furieux de ne pas l’avoir été, s’acharnait contre Monsieur Yves Boudot Directeur Délégué et ses « alliés » à qui il voulait faire payer cette non nomination.

– Au sein du Comité de Direction, des alliances, souvent des alliances contre-nature, se nouaient et se dénouaient au gré des évènements. Certains cadres, y compris des cadres du comité de direction commençaient déjà le grand écart consistant à soutenir le PDG à l’intérieur de la Compagnie, et à battre campagne à l’extérieur pour leur propre compte ou pour celui de mentors dont ils attendaient un renvoi d’ascenseur le moment venu.

– Pendant ce temps, fortement médiatisées, les menaces de grève ou les suspensions de préavis de grève du personnel, s’enchaînaient de manière quasi ininterrompue. Sans vouloir juger le bien fondé de ces grèves, rappelons-en les dernières annonces :

  • Mars 1996 : Préavis de grève ISTAA de 24h00 le 15 mars (Grève suspendue dans l’attente de la rencontre de Bangui)
  • Mars 1996 : Réactivation du mot d’ordre de grève suite à la « non application » des accords de Bangui

D’ailleurs cette question des grèves reviendra avec plus de force encore en 2001 et précipitera la chute.

  • 21 Février 2001 : préavis de grève du SUTAS pour une période de 18 mois « à compter de ce jour »
  • 28 Février 2001 : préavis, puis grève du personnel navigant commercial
  • 22 Octobre 2001 : grève illimitée du PNT et du PNC

Au sujet des grèves, déjà du temps de Monsieur Yves Roland-Billecart et encore après lui, nous avons, sans succès, attiré l’attention des délégués sur le fait « qu’à notre connaissance, il était de notoriété publique qu’en Afrique, seules trois sociétés commerciales pouvaient prendre le risque d’annoncer de manière répétitive des préavis de grève, ou se mettre effectivement en grève sans risquer de perdre un seul client : La société de distribution de l’eau, celle de l’électricité, et celle du téléphone. (Les portables n’étaient pas encore commercialisés). En effet, en plus d’être branchés, les clients de ces sociétés, appelés les abonnés, n’avaient pas d’autre choix ».

Alors que, dans le transport aérien commercial, l’annonce d’une grève équivaut en pratique à une grève réellement faite…

Le pire, et c’était le cas que nous vivions, une succession de dépôts de préavis de grèves suspendues sans être annulées, était de nature à effrayer durablement les clients qui pour voyager, avaient naturellement d’autres choix qu’Air Afrique. Dans la pratique, ceux-ci préféraient se prémunir contre la grève, au cas où elle surviendrait, donc évitaient les vols Air Afrique.

L’épée de Damoclès au-dessus de la tête de la Direction Générale se trouvait aussi et malheureusement, être suspendue au-dessus de nos propres têtes ainsi que de celles de nos partenaires, agences de voyage et transitaires, mais surtout de nos clients, le tout à la grande joie de nos concurrents qui n’en espéraient pas tant.

Chapitre VI.3 – Les petits pas de la pieuvre

→ Chapitre VI.5 – L’estocade finale

2 comments to Chapitre VI.4

  • NDI

    Merci Marchal pour ces informations. Quelques passages méritent d’être commentés.

    LA GESTION QUI COMMENÇAIT A SENTIR LE SOUFRE : c’est l’époque en particulier où personne, y compris le contrôleur de gestion, ne pouvait expliquer objectivement la “chute” des recettes fret, ce qui t’avait conduit, toi et d’autres directeurs, à dire qu’on devait arrêter l’affrètement de l’AN12 basé à Cotonou et utiliser le B737 passagers de LINA CONGO en version “quick change” parce que la nature du fret avait changé. Ce changement de nature tu as dit l’avoir constaté lors d’un de tes passages en transit à l’escale de Cotonou.

    BOUDOT A TOUT FAIT POUR FAIRE CAPOTER L’AFFAIRE à partir du moment où il a su que je garderai le Contrôle de Gestion.. Donc Boudot est bien à l’origine de ta non nomination…

    parce que ROLAND BILLECART AVAIT APPRIS QUE J’AVAIS UNE RELATION AVEC UNE AFRICAINE (sic) : Je ne pense pas du tout que les secrets d’alcôve aient pu avoir une quelconque influence sur le jugement professionnel que monsieur Roland Billecart portait sur ses collaborateurs ; par contre oui, ils pouvaient profondément modifier leurs relations extra-professionnelles.

    ENFIN JAMAIS L’ISTAA N’A DEMANDE MON DEPART D’AIR AFRIQUE AU CONTRAIRE DE CERTAINS AUTRES EXPATRIES. À qui penses tu encore ? Par ailleurs, où ai-je écrit cela ?
    L’ISTAA a demandé le départ de “l’équipe Billecart” dont toi et moi faisions partie et cette demande n’était pas nominative au départ, puis elle a fini par ne concerner que les expatriés, mais tous les expatriés dont tu faisais partie.

  • Francois Marchal

    Je lis avec intérêt ce texte sur l’histoire d’Air Afrique “Mon ère Afrique”. Je le trouve très intéressant. Bravo Yacouba pour toute cette somme.
    Dans le Chapitre VI.4 tu écris des choses à mon sujet qui sont inexactes. Effectivement, Roland Billecart m’avait promis de me nommer directeur financier au départ de Listre, L’Agence Française de Développement ne voulant plus détacher de directeur financier afin de se tenir à l’écart de la gestion de la compagnie qui commençait à sentir le souffre.
    Cela ne s’est pas fait pour 2 raison principales : 1) Boudot a tout fait pour faire capoter l’affaire à partir du moment où il a su que je garderai le Contrôle de Gestion (question posée par Pape Thiam lors d’un déjeuner du Comité de Direction au Palm Beach); 2) parce que Roland Billecart avait appris que j’avais une relation avec une africaine (sic).
    A partir du jour où Roland Billecart a appris cela, il m’a fermé la porte de son domicile alors que précédemment j’allais dîner chez eux quasiment tous les samedis soirs, après la messe chez le Nonce Apostolique.
    Si, comme tu l’écris, je m'”acharnais” sur Yves Boudot et ses “alliès” ce n’est pas du tout pour cette raison mais pour des raisons tout à fait objective.
    Enfin, jamais l’ISTAA n’a demandé mon départ d’Air Afrique au contraire de certains autres expatriés.

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