Le commentaire de Jacques Julien sur les raisons et les conditions de la location du Boeing 707F de Naganagani m’a amené à demander à Yacouba N’Diaye de nous raconter cette autre tranche de notre histoire commune.
La location a débuté en 1989. En amont de cette décision prise par monsieur Yves Rolland-Billecart, rappelons qu’à la fin des années 1980, le ciel “airafricain” avait enregistré la venue des premières compagnies charter, et en particulier celle de POINT MULHOUSE opérant ses vols entre Mulhouse et Ouagadougou. Dans la foulée de cette première desserte, monsieur Maurice Freund menait une vaste campagne active pour l’ouverture de Lomé après des incursions au Niger et en Mauritanie, tandis que Nouvelles Frontières s’attaquait à la desserte d’Abidjan.
De tous les États membres, c’est le Burkina Faso qui était le plus engagé en matière de charter puisqu’il il avait un avion immatriculé qui opérait avec des droits Burkinabé sur le long-courrier passager.
Lors de la campagne maraîchère de 1985, prétextant de l’incapacité de la compagnie multinationale à assurer le transport des haricots verts du Burkina Faso, les autorités sollicitèrent les responsables du POINT MULHOUSE pour la création d’une compagnie cargo ; ainsi naquit Naganagani. Cette crise était certes due à la tension de la flotte cargo Air Afrique et UTA durant les campagnes, mais aussi et surtout à la mauvaise planification des enlèvements.
Le président Sankara après nos explications a bien compris les responsabilités et a fait “dégager” le directeur général de la société UCOBAM (Union des coopératives et maraîchers du Burkina) responsable de cette mauvaise planification des prévisions en vue de l’organisation des transports.
Revenons à la création de Naganagani : C’est Maurice Freund, Directeur Général de Point Mulhouse, qui raconte mieux que quiconque, ce qui s’est passé.
« Q : Racontez-moi l’histoire des haricots verts.
M. F. : Je suis à Paris. Il est 4 heures du matin. On est en 85. Il faut vérifier. On avait un téléphone un peu spécifique on appelle chez nous le téléphone rouge au cas où il y a un problème avec un pépin d’avion. 4 heures du matin et on nous dit : « Y a Thomas Sankara qui veut te parler ». Il me dit « Ecoute, Il faut que tu viennes immédiatement au pays. J’ai un problème énorme. Il faut qu’on évacue les haricots. Il faut que tu viennes quand peux-tu venir ? » « Ecoute il est 4 heures du matin, j’ai un avion qui décolle à 6 heures. Je peux le retarder un peu et je peux être chez toi à midi. OK on t’attend à midi »
J’arrive à Ouagadougou à midi 30. On file à la Présidence, Il y a au moins 8 ministres qui sont à côté. On m’expose un peu le problème, les haricots. Je connaissais un peu l’histoire, 750 tonnes de haricots qui pourrissent dehors. Il faut qu’on évacue. Comment on peut faire ? J’ai dit il n’y qu’une solution. Tout le monde est là. Un pays est souverain. On créée une compagnie aérienne de cargo pour évacuer les haricots.
Le Point était quand même très très riche parce qu’on a payé cash 4,5 millions de dollars, un Boeing 707 qui pouvait transporter 40 tonnes de haricots par vol. Tous les ministres étaient là. Quels papiers ? Qu’est ce qu’il faut faire ? Déclaration. En 48h, on a acheté un avion, on a peint Naganagani. L’avion est resté très longtemps avec la couleur bleue qui trainait parce que ça n’avait même pas eu le temps de sécher la couleur jaune quand on a mis Naganagani sur l’avion. Au Luxembourg où on a acheté le Boeing 707. Et donc, on est parti…»
L’avion a été basé à Marseille où l’équipe de monsieur Pierre Schneider, gérant de la société GMTT GROUPEMENT MIXTE TRANSPORTS ET TOURISME assurait la maintenance, le suivi opérationnel et la commercialisation du fret sur le trajet Marseille Ouagadougou à raison de deux fréquences par semaine.
En 1989, le plan de redressement proposé par monsieur Yves Rolland-Billecart faisant obligation à tous les états membres de mettre fin à l’activité des compagnies charter, le Burkina devait à la fois stopper les vols passagers du POINT MULHOUSE, et mettre fin aux vols cargo de Naganagani.
Malgré les tensions et la gène imposées par cette décision, la cessation des vols passagers n’a pas posé de grandes difficultés. Concernant le cargo, le Burkina a informé Air Afrique de ce que l’État s’était endetté à hauteur de 3 000 000 de dollars pour faire “hushkitter” le 707 afin de respecter les clauses de nuisance sonores, et appréhendait une cessation d’activité qui lui laisserait cette ardoise sur les bras. Pour régler la question de la dette sans remettre en cause le principe de cessation de l’activité des charters, une convention a été signée entre le Burkina Faso et Air Afrique par les directeurs généraux des deux compagnies. Air Afrique s’engageait à :
- Louer auprès de Naganagani en ACMI le Boeing 707F pour une durée minimale de trois ans avec un MGH (minimum d’heures garanti) lui permettant de régler la totalité de sa créance. Il était entendu que tous les vols se feraient désormais sous numéro RK.
- Reprendre la totalité du personnel de la compagnie Naganagani sauf refus clairement exprimé par les concernés.
- Maintenir la desserte Marseille-Ouaga-Marseille (ainsi que certains tarifs particuliers contractuels) qui selon les dirigeants de Naganagani, avait crée un trafic fret qui disparaitrait avec la fermeture de la base Marseille.
- Conserver les accords avec la société GMTT pour ce qui concernait la maintenance et le suivi opérationnel des rotations de l’appareil et des équipages. La commercialisation reprise par Air Afrique était assurée en France par UTA dans le cadre des accords de représentation liant les deux compagnies.
- Inscrire sur le fuselage de l’appareil d’un côté “Naganagani avant Air Afrique”, et de l’autre côté “Air Afrique avant Naganagani”.
Concernant le logo sur la dérive, les discussions ont été âpres et ont duré plusieurs jours, le chef d’escale, le directeur commercial et le directeur fret de Naganagani ne voulaient pas perdre « la bataille de la queue » comme ils le disaient. Pour finir, avec beaucoup d’amertume et de rage, après que nous ayons fait remarquer que le nombre de lettres sur le fuselage était srictement le même pour les deux compagnies, (à ce stade tout le monde compte pour vérifier) le logo de la compagnie exploitante a été accepté contre le rajout d’un macaron du drapeau du Burkina Faso au dessus de l’antilope cheval.
L’arrivée dans la flotte de cet appareil a permis à Air Afrique de donner un véritable nouvel envol à son activité fret. En effet, avec cet avion “hushkitté”, Air Afrique pouvait desservir de nouvelles escales antérieurement interdites au seul appareil cargo de la flotte : le DC8 63F, non “hushkitté” et qui ne pouvait voler qu’en Afrique et au Moyen-Orient. Grâce au 707F, puis aux 707F suivants il a été possible pour Air Afrique de desservir New-York, Athènes puis Bruxelles, Rome et Lisbonne.
Par ailleurs, avec et malgré 6 équipages complets sur le DC8 63F il n’était pas possible de produire plus de 2000 heures de vol par an du fait de la réglementation PN d’Air Afrique et du réseau réduit sur lequel cet avion pouvait voler. En outre les heures de vol du DC863F, en raison du double « poids » des équipages et celui de la structure de maintenance pour un avion unique dans la flotte, étaient en équivalent ACMI estimées à 2700 dollars contre un afrètement du 707F à 1900 dollars à la signature du contrat.
NB : Contrairement à une croyance populaire ancréee à Air Afrique, les contrats d’affrètement des avions cargo n’ont jamais été négociés et signés par le Directeur fret, mais par la Direction de l’Exploitation et la Direction Financière au niveau du Directeur Délégué… comme pour les avions passagers.
Cette constatation économique pour des avions ayant des capacités d’emport quasi identiques est à l’origine de notre demande pour que le DC8 63F soit vendu et remplacé par un 707F affrèté même s’il n’était pas possible d’optimiser l’utilisation des équipages de deux compagnies différentes.
J’avais pris l’option, et les Directions Générales successifs l’ont acceptée, de gérer l’activité fret uniquement avec des avions “affrètés” pour les raisons expliquées ci-avant. Il fallait pouvoir jouer sur la banalisation des équipages, donc choisir des compagnies qui pouvaient offrir deux avions et pourvoir à leur remplacement durant les visites de maintenance ou en cas de problèmes techniques.
Ceci explique les raisons de la location des 707F chez TAROM puis chez DAS AIR après le départ du 707F de Naganagani. DAS AIR a remplacé TAROM lorsque cette compagnie qui avait trois appareils au moment où nous avons contracté en a perdu un (YR-ABN)à Ndjaména, puis un autre (YR-ABM) à Abidjan. Avec un seul avion appareil, TAROM ne remplissait plus les conditions d’éligibilité définies.
bonjour a tous
pilote instructeur en guadeloupe j’ai beaucoup révé dans les annees 80 en achetant des actions a la satt qui a été un moment proprietaire de ce boeind je serais tres reconnaissant si l’un d’ente vous pouvais m’envoyer une foto de cet avion aux couleurs du burkina ou tout autre foto de cet appareil
salutations
A ANDREA
La photo est là : http://airafrique.eu/avions/xtabx1.jpg
C’était je crois au début de la coopération entre Air Afrique et Naganagani vers la fin des années 80, ensuite les avions ont été scotchés RK.
Le B 707 XT-BBF a terminé sa carrière au décollage de Bratislava, lors d’un vol pour NDJ. Une accélération arrêt qui s’est terminée après le bout de piste. L’avion a été abandonné sur place. Il y avait selon la commission d’enquête 32 pannes sérieuses. Cherchez sur Airliners.net à l’immat 9G-ROX.
Le F-GDPS est parti pour Nationair et a été démantelé.
Je vous contacte pour les DC-8.
Amicalement,
J.JULIEN
Qu’est devenu le B707 XT-BBF, j’ai toujours les photos au dessus de mon bureau?
Et le DC8 F-GDPS? J’ai les photos des 2 DC8 et du B707.
Bonne année à tous.
Bonjour,
Ces photos m’intéressent, pouvez-vous me les envoyer ?
Comment vous êtes-vous intéressé aux avions de Naganagni ?
Amicalement
Daniel Daix
Tres interessant